La poliorcétique est l'art de prendre les places fortes. Le terme fut créé par Enée le Tacticien, un auteur grec qui a répandu à l'époque un traité éponyme qui donnait les techniques pour se défendre et mettre en place un siège.
Si avec l'artillerie les murailles ont cessés de ceindre nos villes, avec elles ont aussi disparus ces engins de bois et de métal, ces chefs d'œuvres mortels de charpentiers que sont les trébuchets, catapultes et onagres.
Mais le souvenir de ces époques tumultueuses n'a pas disparu pour autant. Si les grandes batailles enflamment toujours nos imaginaires en quête d'héroïsme c'est en partie grâce à ses machines. Et le jeu vidéo ne s'y est pas trompé en faisant des armes de sièges, des armes emblématiques.
Aussi longtemps qu'il a existé des fortifications, il y a toujours eu la volonté de les abattre pour s'accaparer l'endroit convoité. Même si le principe de base du siège est le blocus d'une ville pour l'obligée à se rendre, il arrive que les patiences s'usent ou que le temps joue contre l'assaillant...
C'est à ce moment là que l'imagination se mets en branle pour inventer un arsenal propre à rentrer dans une place qui ne veut pas de vous. Avec une évolution digne d'une véritable guerre technologique, attaquant et défenseur vont redoubler d'astuces et de technicité pour être inarrêtable ou invulnérable selon que l'on se positionne devant ou derrière les murailles.
Pour mieux nous rendre compte de cette fertile imagination, nous allons faire un tour d'horizon des différentes machines de siège les plus connues. Ce sont elles que nous aurons le plus de chance de retrouver plus tard dans le jeu vidéo, que ce soit pour des raisons de cohérence historique ou de pur design.
I. Les armes de siege communes
Les engins d'approche
La tour d'assaut ou hélépolis ou beffroi: Pour commencer cette série de définitions, on débute par l'un des plus impressionnants engins de siège, la tour d'assaut. A la fois méthode d'approche, d'attaque et d'invasion, le beffroi nécessite un gros investissement pour un gros risque.
Le principe est simple, vous construisez une tour en bois que vous aurez ignifugé avec des plaques de fer ou des peaux de bêtes fraîches. Cette tour sur plusieurs étages (jusqu'à neuf pour l'hélépolis du siège de Rhodes!) est montée sur roues et chargée d'hommes d'armes. A son sommet on peut y placer des balistes, des scorpions... Un peu de tout, quoi. Puis vous y disposez une sorte de pont qui tombera sur la muraille et permettra à vos soldat de passez par le sommet du mur.
La tour d'assaut est fragile et soumise à une topologie régulière. Les fossés doivent être comblés, les douves asséchées et les terrains marécageux n'aident pas. L'hélépolis de Rhodes dont je parlais a aussi été flambée avec du feu grégois. Il faut mieux donc être sur de son coup...
Voici quelques illustrations pour mieux se rendre compte de l'installation.
Le must du must étant la "Truie" une machine de guerre de 1377 utilisée pendant la Guerre de Cent Ans. II s'agissait d'un beffroi sur lequel était installé un trébuchet. Mais laissons un témoignage de l'époque décrite l'engin... "or eurent conseil chil de l'ost pour leur besoingne approchier et pour plus grever leurs anemis, que ils envoyeroient à Le Riole querre un grant engien que on appielle une truie, liquel engiens était de telle ordonnance que il gettoit pierre de fais, et se poient bien C hoimmes d'armes ordonner dedens et en approchant assallir la ville"
Les échelles:Tout bête: vous prenez une échelle, vous la mettez contre le rempart et vous avez le plus simple des engins d'approche. Alors bien sûr vous pouvez y ajouter des fioritures: crochets au sommet pour compliquer le travail des défenseurs, châssis roulant pour faciliter l'approche, etc. Ensuite, vous n'avez plus qu'a trouver quelques courageux pour y aller dessus...
Le mantelet: Engin d'approche léger, le mantelet est une palissade mobile qui sert de couverture aux archers ou aux arbalétriers. Osier tressé ou panneaux de bois, tout est bon du moment que cela protège vos miches des projectiles adverses. On peut aussi ménager des ouvertures dans le mantelet qui feront d'excellentes meurtrières.
Le chat: Le plus difficile pour les assaillants d'une place, c'est d'arriver entier au niveau de la place forte. Si le mantelet vous offre une couverture à distance, il ne vous protègera pas des cailloux qui vous tomberont dessus depuis un mâchicoulis ou un rempart. Dans ce cas, on construit carrément une sorte de "préau" mobile (car vous l'aurez monté sur roues) que l'on appelle le "chat" (ou chatte). Au préalable, il sera recouvert de peaux fraîches ou abondamment mouillé pour éviter d'y mettre le feu.
Après, vous y mettez ce que vous voulez en dessous: un bélier, un trépan, des hommes avec des échelles, des sapeurs... N'importe quoi. C'est le moyen le plus simple pour approcher efficacement une place forte qui a du répondant.
Le tonnelon: Si les précédents engins vous étaient sans doute connus, nous allons terminer les engins d'approche sur une machine pas banale, le tonnelon. Il s'agit d'une nacelle que l'on va monter au-dessus des remparts. Cette nacelle contiendra des archers pour tirer sur les défenseurs en contre-bas ou plus simplement des volontaires qui feront de l'observation pour l'assaillant. Le tonnelon est donc constitué d'une nacelle qui est placée au somment d'un mat que l'on monte sur un châssis roulant. Le mat est articulé à sa base, un peu comme une grue. Un système de poulies se charge de dresser le mat avec les courageux à son bord.
Je le range comme "engin d'approche" mais en fait il ne s'approche pas des masses car beaucoup trop vulnérable. Mais comme il sert de poste d'observation, il facilite l'approche des assaillants.
Ce qu'il faut comprendre avec le principe du bélier, c'est que la vitesse d'impact est capitale. Cette dernière peut être accélérée de différentes manières: on peut suspendre le bélier à des poulies et des cordes, ce qui facilitera son maniement tout en lui donnant un plus grand élan grâce à un mouvement de balancier. On peut aussi le faire reposer sur des rouleaux afin de le propulser. Les deux principes ont l'avantage de ne pas faire subir le choc aux servants du bélier, garantissant ainsi moins de fatigue.
Le trépan: est une variante du bélier. Le principe est exactement le même. Un tronc à l'horizontale que l'on propulse contre une surface en vu de la briser. La différence étant que le trépan (ou corbeau) n'est pas muni d'une tête plate, mais d'une pointe en métal, très solide de préférence. Le trépan n'a pas pour fonction de s'attaquer aux portes mais directement aux murs eux-mêmes. En effet, le trépan vise les joints en mortier des murs, un peu comme avec un burin. Le but étant de desceller les pierres pour affaiblir un mur ou même percer dedans.
Vu la longueur de cette besogne, le trépan était accompagné d'un chat pour le protéger.
Les tunnels et les sapeurs: L'arme absolue pour faire tomber un château. Plus efficace que les trébuchets et autres lanceurs de projectiles que nous allons étudier bientôt. La sape était tellement efficace que les sapeurs étaient payés plus que les autres soldats au même titre que les arbalétriers.
La sape consiste à creuser un tunnel sous les murailles. Une fois sous le mur, on attaque directement les fondations que l'on creusent. Une fois cette besogne achevée on détruit le tunnel. Le mur, privé de sa base, s'effondre immédiatement.
La technique demande donc un grand savoir-faire, il faut bâtir un tunnel avec des étais qui puissent supporter les pierres, puis il faut calculer le creusement de sorte qu'il puisse arriver sous le mur. Pour détruire le tunnel, on peut y mettre le feu (le cochon gras mort est un bon retardateur notamment...) ou un coup de canon bien placé suffit, si l'époque le permet.
La sape était si effrayante pour l'assiégé que les contre-mesures était nombreuses: Surveillance de nuit, écoute attentive des coups de pioche, baquet d'eau posé à proximité des murailles (si la surface se ride, c'est que l'on creuse), et surtout contre-sape. Le défenseur peut construire des tunnels sous les sapeurs pour les faire s'effondrer, voire même aller à la rencontre des sapeurs pour porter le combat sous terre!
Mais généralement si la sape est réussie, votre château est perdu.
La catapulte fonctionne par la tension d'une pièce de bois horizontale aux extrémités de laquelle se trouve une corde, et... Bon soyons limpide: Une catapulte, c'est branlé comme une arbalète, tout simplement. Un arc est posé à l'horizontale sur une structure en bois. Par un système de crémaillères, on bande cet arc qui accueille un bras articulé à la base, bras qui reçoit lui-même une cuillère dans laquelle vous mettrez votre projectile. (caillou, flèches, pointes, pot-à-feu, têtes ennemies... Faites parler votre imagination.)
L'engin ne se construit pas sur place comme un trébuchet par exemple et est donc muni de roues, ce qui la classe dans la catégorie des armes de jet mobiles. Au final, le principe de la catapulte comme arme de siège va tomber en désuétude. Si l'arme a fait les beaux jours des romains, les climats plus humides de l'Europe non-méditerranéenne auront raison du mécanisme de la catapulte, notamment du fait que l'arc perde sa tension avec l'humidité et surtout avec la découverte d'engins plus efficaces.
L'onagre: Là où la catapulte utilise le principe de l'arbalète pour lancer son projectile, l'onagre lui, se sert d'une faisceau de cordes torsadés qui emmagasinent l'énergie. Deux planches sont mise en parallèles entre lesquelles ont fait passer les cordes, puis dans cet ensemble de cordages, vous glissez un bras qui accueillera à son sommet une cuillère ou une fronde. Quand vous rabattez la cuillère par un système de crémaillères vous tordez les cordes qui emmagasinent l'énergie comme un ressort. Le fait de relâcher la cuillère détend brusquement les cordes, propulsant ainsi votre projectile. On peut faire varier la parabole décrite en réglant l'arrêt de la verge. Celle-ci finit en effet sa course contre une pièce de bois verticale ou inclinée que l'on protège au préalable d'un sac de paille solidement amarré. La machine n'est pas très impressionnante en elle-même, mais possède une grande force. Elle est typiquement employée pour tirer des pots de feu grégois ou pour disperser des chausses-trappes (ou ce que vous voulez...)
La baliste ou scorpion ou arbalète à tour: La baliste, dont le terme est parfois confondu avec la catapulte vue plus haut, est en fait une très grosse arbalète montée sur pied. Enfin arbalète, j'exagère un peu... il ne s'agit pas d'un arc posé à l'horizontale comme on peut le croire au premier coup d'œil mais de deux sections de bois alignées qui sont maintenues dans un cadre par des cordes torsadées entre-elles. Observez l'illustration qui sera plus parlante.
Le trébuchet: Allez, on va entrer dans la catégorie "grand luxe" du matos de siège. Je vais vous parler d'une bécane dont on disait d'elle que sa seule vue suffisait à faire capituler une ville. Apparu chez les musulmans et les chrétiens en plein XIIème siècle (qu'ils tiennent peut-être eux-mêmes des chinois) et sur le pourtour méditerranéen pour se foutre joyeusement sur la gueule, le trébuchet inaugure un nouvel âge pour les armes de siège en leur apportant un surcroît de fiabilité et d'efficacité. Les mécanismes à tension sont fragiles, facilement soumis aux contraintes
météorologiques. Le trébuchet va lui, nécessiter plus de moyens et des ingénieurs spécialisés, mais pour un bénéfice de destruction non-négligeable.
Il paraitrai (ça reste au conditionnel) que ce nom curieux fut inspiré par la physionomie de la machine... Je ne comprends pas pourquoi...
La bricole et la pierrière: Dans le genre engin de siège de poche, si le couillard fait partie de l'arsenal des assaillants, la bricole se retrouve elle du coté des défenseurs. Machine placé au sommet des tours ou des remparts, elle harcèle l'ennemi en contre-bas de sa cadence rapide. (1 pierre par minute). La bricole, comme la pierrière dont elle est une évolution, est une machine à traction humaine. Ce qui veut dire que la verge est tirée par des cordes à l'aide de quelques servants. Si la pierrière ne marche qu'avec des biceps, la bricole utilise elle un petit contrepoids fixe, largement suffisant pour propulser des roches de 10 kg à 80 m.
La bricole est souvent associée à une machine de guerre pour femmes, car elles se mettaient aux machines quand les hommes devaient descendre pour le combat à pied.
Ses dimensions réduites, nous qui sommes habitués aux machines gigantesques, ne doivent pas vous faire sous-estimer cet engin. Ainsi, Simon de Montfort est mort au siège de Toulouse en 1218 d'un boulet de pierrière en pleine tête.
Le mangonneau: Maintenant que vous connaissez le principe du trébuchet, il me sera beaucoup plus facile de parler du mangonneau. Comme son illustre prédécesseur, le mangonneau est un engin qui utilise un contre poids et une fronde pour lancer un projectile. La huche articulée du trébuchet avait cependant un léger souci, elle faisait décrire au projectile une courbe très parabolique qui la rendait imprécise et surtout qui faisait passer les projectiles au-dessus des murailles. Quand on avait besoin de détruire le mur on servait alors d'un magonneau. Ce dernier possède un contrepoids fixe sur la mat qui donne plus de vitesse et surtout une trajectoire tendue qui frappe les murs à l'horizontale. Cependant, l'absence de mobilité de contrepoids oblige la structure à supporter plus de contraintes mécaniques qui se traduisent par des à-coups sur le corps de la machine et donc une nuisance à terme sur la précision. La mangonneau pouvait même être accéléré par une équipe de servants qui tiraient sur le contrepoids en plus de sa vitesse initiale. Autant vous dire qu'il fallait être bien synchro pour tirer.
Comptez deux boulets de 100 kg par heure et pour les gros modèles, 120 personnes pour le faire tourner et l'entretenir.
II. Le gameplay de la poliorcétique dans le jeu vidéo: Total War et Stronghold.
L'adaptation des réalités à la viabilité du gameplay.
L'improvisation du gameplay de siège: Starcraft 2.
Comme nous l'avons vu précédemment, la mise en scène du siège répond à un gamplay spécifique, une phase organisée dans le jeu. Le siège militaire n'est pas une guerre comme les autres. Si le genre est dépendant du jeu de stratégie et par la même du wargame de plateau, il respecte des règles établies, délimitées par un lieu et une unité de temps.
Mais que ce soit dans Stronghold ou Total War, le siège n'est jamais improvisé, il est codifié dans un sens ludique lui enlevant une partie de sa réalité, même si les developpeurs ont toujours à cœur de proposer un réalisme technologique et historique.
D'autres jeux ne proposent que de la tactique pure dans leur gameplay mais incidemment, il arrive parfois de créer ex-nihilo un gameplay de siège à partir d'unités dont le rôle premier se trouve alors détourné.
Starcraft 2, STR que vous connaissez, ne propose pas de château à prendre. Néanmoins la base de départ, celle sur laquelle va se concentrer les bâtiments et donc la technologie, se trouve tout le temps sur une partie de carte surélevée à laquelle on accède par une rampe plus ou moins étroite selon les maps.
Ce décalage topographique rappelle les escarpements sur lesquels se bâtissaient les châteaux d'autrefois, la rampe, elle, étant le chemin soigneusement resserré pour limiter l'accès aux assaillants.
SI ce premier parallèle avec les châteaux-forts est logique, les joueurs vont commencer à développer une stratégie de poliorcétique à partir de ce que Blizzard leur donne.
Le joueur Terran aura donc tout intérêt en début de partie de waller sa choke, c'est à dire de fermer son accès à la rampe se coupant ainsi des agressions. Pour ce faire, le supply depot est tout trouvé. Ce dernier peut en effet se rabaisser pour laisser la passer des unités. C'est donc une véritable herse qui est à la disposition du joueur. Et seuls des assauts répétés peuvent en venir à bout car bien sûr les VCS peuvent venir les réparer, comme un assiégé venant éteindre les incendies.
Si le joueur Terran a accès à des remparts, axant son gameplay sur la défense de position, les autres races vont elles-aussi reprendre à leur compte cette logique de défense même si elles ne furent pas conçues dans cette optique. Les Protoss, par exemple, vont reprendre le rempart. Dans une expansion rapide, il sera courant de faire un "mur" de bâtiments de production qui se prolonge jusqu'au second Nexus , obligeant l'assaillant à se déporter vers la ligne de minerai, créant ainsi une choke artificielle. L'adaptation Protoss à la technique du siège va même plus loin, il arrive parfois que le joueur ferme entièrement son accès alors qu'il n'a pas de bâtiment rétractable ou déplaçable. Le joueur attaque donc son propre camp pour se ménager une sortie (un pylône, souvent.)
Les Zergs ne sont pas en reste: alors que la race est entièrement basée sur le mouvement et les agressions éclairs, il arrive souvent de voir des joueurs placer les chambres d'évolution sur une choke large afin de la resserrer. La chose est risquée (perte d'un avantage en cours de construction) mais est aujourd'hui parfaitement mesurée chez les Zergs.
Dans cette optique de défense, le Zerg peut aussi piéger le terrain, créant un véritable glacis défensif pour prévoir un siège. Les Banelings, unités explosives peuvent s'enterrer, devenant par la même des chausses-trappes redoutables contre un groupe de Marines voulant s'installer (ou juste passer par là). Il est aussi possible de créer des forêts d'Aiguillons Rampants, tours de défense au sol qui transforme une zone complète en non man's land uniquement prenable par un travail d'usure ou de vagues d'assaut couteux.
En défense donc, les joueurs ont créé par expérimentation un gameplay complet de défense de siège, en travaillant sur des stratégies de fortifications et de pièges. Le jeu a donc forcé les joueurs à réinventer dans la fiction vidéoludique ce que nos ancêtres testaient pour de vrai contre leurs ennemis.
Pour ce qui est de l'assaut, le Terran semble une nouvelle fois favorisé. Le char peut en effet se convertir en char de siège. Devenant une véritable pièce d'artillerie fixe, le char siégé peut tenir une position si il est bien épaulé et garanti des dégâts maximum sur de larges zones. Si il est très efficace en défense de place, sn rôle en tant qu'attaquant nécessite des adaptations. Le problème de la vision dans Starcraft impose au joueur de voir là où il veut tirer, chose dont ne s'encombraient pas les assaillants au Moyen-Age.
Pour tirer sur la base adverse, le joueur Terran doit ruser et adapter le gameplay pour en faire un gameplay de combat de siège. Si le joueur assiégé est laissé trop longtemps en paix, il risque de developper sa technologie et faire une sortie en force qui brisera le siège. Il s'agit alors d'obtenir la vision de la base adverse pour le pilonner ensuite. Ce sera alors au Médivac ou au Viking, deux unités volantes, de se transformer en unité de reconnaissance bon marché. Un Marine peut aussi être envoyé à la mort pour donner l'information (souvent tuer par un char allié d'ailleurs). Le char de siège, unité de défense, se trouve ainsi convertie en unité d'attaque brisant les bâtiments et bloquant les sorties de troupes qui se feront pilonner.
Le Zerg toujours dans son optique de mouvement, va adapter un bâtiment spécial pour en faire un briseur de défense. Le réseau de Nydus permet au Zerg de créer un canal du même nom, au travers duquel il peut déplacer ses unités vers un point éloigné de la carte.
Le Canal de Nydus ne peut cependant sortir que si le Zerg a le point d'arrivé dans sa vision. Le bâtiment est donc plus propice pour faire des attaques de contournements multi-fronts. Pourtant, les joueurs Zergs arrivent à placer un Canal de Nydus directement dans la base adverse. Véritable assaut par tunnel, le Zerg va obtenir la vision par un Dominant, unité inoffensive et si lente que l'adversaire fini par oublier sa présence. Or, en donnant la vision, même sur un bout de base, cela suffit à placer un Canal de Nydus vous condamnant à périr sous un flot continu de Zerglings, Roaches, et Hydralisks alors que votre fortification est intacte...
Mais attaquer la base adverse, c'est aussi monter à l'assaut de façon barbare. Si il est possible de grimper la choke en insistant et en sacrifiant au passage ses unités, l'adaptation du gameplay va permettre de retrouver une autre modalité du combat de siège dans Starcraft 2. La technique dite "de l'ascenseur" en est un nouvel exemple.
En utilisant le Médivac, unité de transport et de soins Terran, le joueur peut placer son armée au bas d'une base, dans un coin discret et utiliser son transport de troupes non pas comme une unité de soutien mais comme un ascenseur qui enchainera les aller-retours entre la base adverse et ses troupes. Véritable réinvention de l'échelle de siège, l'ascenseur, solution logique, reprend les solutions de la poliorcétique pour les adpater à Starcraft 2.
Même si les armes de siège ne se retrouvent pas un jeu vidéo, on note avec Starcraft 2 que rentrent rapidement dans une logique de combat de siège, adaptant, réinventant les outils que le gameplay leur donne.
La poliorcétique et ses armes se retrouvent dans le jeu vidéo, même quand on ne les prévoit pas.
Le faux gameplay de siège dans la série des Age of...
La série culte d'Ensemble Studios des Age of... est un RTS qui doit fort logiquement proposer un gameplay de combat de siège. Que ce soit par le biais des unités ou des époques proposés, les Age of... font la part belle aux attaques de camps et de châteaux. Ces jeux proposent aussi une grande liberté de fortification permettant d'improviser un bastion difficilement prenable.
Pourtant, alors que le principe du jeu laisse entrevoir un gameplay complet de combat de siège, il apparait que ce dernier n'existe tout simplement pas. Autre fait encore plus curieux les Age of... proposent des engins de siège à construire, mais aucune règle du combat de siège ne va s'appliquer et aucune cohérence technique n'est prise en compte.
Les Age of... sont des jeux où la poliorcétique est purement plastique.
Les engins de siège sont en effet des unités comme les autres, a ce titre elles se dirigent toutes seules et surtout il est possible d'en produire en masse. Qui n'a jamais fait de mass trébuchets dans Age of Empires 2? De même, dans Age of Mythology il est possible de sortir des hélépoles par paquets de dix sans trop se fatiguer.
D'ailleurs faut-il des engins de siège pour faire tomber les bâtiments? Pas du tout, une troupe d'archers devant une porte la ferra tomber aussi surement de cinq béliers, que vous pouvez grouper par douzaines devant un même pan de mur d'ailleurs.
Dans les Age of... l'époque et le lieu oblige à penser en terme de siège. On ne peut
guère mettre en scène la guerre au moyen-âge sans y placer ses machines emblématiques que sont les trébuchets.
Et même si les Age of... respecte le principe shi-fu-mi du RTS, ce principe est très largement atténué, permettant des errements peu conciliables avec la poliorcétique mais néanmoins fun à jouer. Exemple typique de Age of Mythology: sortir une douzaine de tours de siège et les voir aligner des hommes à pieds en rase campagne.
Malgré cette totale absence de gameplay spécifique en combat de siège, les Age of apportent néanmoins une démonstration de l'aspect emblématique des armes de sièges. Même si le jeu n'ajoute rien malgré la richesse de son sujet en terme de gameplay, il ne peut faire l'impasse sur tout ce volet technologique et esthétique tant il est foisonnant. Aussi curieux que cela puisse paraitre, c'est par l'absence de gameplay spécifique que l'on démontre réellement que les engins de siège sont des armes emblématiques du jeu vidéo.
Les armes de siège ailleurs...
On conclut rapidement au sujet de l'arme de siège comme auxiliaire de gameplay. Certains beat'em all, comme le Seigneur des Anneaux; Le Retour du Retour par exemple permettent de faire une sorte de "pause" en utilisant un engin de siège pour occire des ennemis
Celui-ci, par un miracle difficilement concevable va fonctionner quasiment tout seul et se recharger avec une vitesse peu commune. Le joueur pourra donc profiter, dans un moment de défouloir, de la toute-puissance des engins de siège. Parfois il s'agira de rejoindre au plus vite un engin afin de détruire un objectif précis. La machine de siège devient un peu la phase rail shooting du jeu se déroulant dans un univers fantasy.
Dans Guild Wars 2, il faut notamment penser à régler la direction et la puissance pour donner un semblant de diversité. On retombe sur la démarche plastique de l'engin de siège et sur son imagerie de destruction imposante. La complexité du fonctionnement de ses engins sera reproduite le plus souvent par un cooldown assez important, émulation un peu foireuse de la complexité des vraies machines de sièges.
L'engin de siège, catapulte ou baliste, est aussi parfois utilisé comme déclencheur dans la progression du jeu. Il fait office d'interrupteur de luxe, où il est plus plaisant de défoncer une porte avec un boulet enflammé que de l'ouvrir bêtement.
L'engin de siège est donc une caution de diversité va t-on dire. Elle renouvelle la façon de jouer de manière superficielle mais "colore" l'ensemble, ajoute une touche supplémentaire de cohérence à l'univers.
Notons aussi ce fait curieux de mechadesign. Les engins de siège des "méchants" seront souvent des appareils à torsion (catapultes) alors que les "gentils" font plus souvent usages de trébuchets et d'armes à contrepoids. Souvent les catapultes de méchants auront un aspect plus tribal, avec un arc en cornes géantes, des pointes, des clous... L'ambiance, quoi...
Expliciter la place des armes de siège comme armes emblématiques du jeu vidéo oblige à se concentrer sur les jeux de stratégie. Composante de la guerre à part entière, le siège militaire implique toutes les qualités de gestionnaire que l'on attend du stratège. D'ailleurs, les écoles d'officiers de l'époque moderne ne se sont pas trompé en mettant le wargame dans le programme d'apprentissage des jeunes nobles voués à devenir officiers.
Si mettre en scène des armes de sièges n'est pas excessivement compliqué, il convient par contre d'opérer des raccourcis pour que cette même mise en scène puisse avoir un impact ludique. Que ce soit par les cadences de tirs qui sont infernales, les accidents qui sont inexistants et les troupes trop dociles pour être crédibles, la poliorcétique dans le jeu vidéo ne se concentre que sur le fun et la stratégie pure.
Autant vous dire que le seigneur qui désirait s'accaparer un château n'avait pas un trébuchet monté en claquant du clic droit, euh des doigts, pardon... Trouver un ingénieur, avoir du bois qui convient, payer le tout et le faire marcher correctement, voilà qui s'annonce autrement plus complexe que d'aligner les machines en bon ordre et prêtes à fonctionner sur un caprice.
Si l'organisation d'un siège et l'assaut appuyé par des machines est ludique et stratégique, il convient surtout de noter que si les armes de sièges sont emblématiques c'est aussi par leurs apparences, leur diversité, leurs effets et leurs projectiles plus curieux les uns que les autres. Le jeu vidéo est une affaire de paramètres chiffrés: plus l'Histoire a de machines différentes et plus le game-designer pourra proposer de diversité et donc de challenge. Et toutes les armes décrites plus haut garantissent toujours plus de skins qui sont très pratiques pour le développeur.
Examiner les armes emblématiques du jeu vidéo, c'est toujours mettre en exergue ce décalage entre la fiction et la réalité. Les armes de siège démontre une nouvelle facette de ce décalage car les diverses facilités techniques font directement écho aux récits de batailles tumultueuses, à l'héroïsme exacerbé des chansons de gestes. Le bélier qui charge la porte de Minas Tirith dans LOTR, les catapultes enflammés de Gladiator, le contrôle omnipotent d'un Total War, la roublardise d'un Starcraft 2, tout exalte cette soif de légendes, de moments épiques qu'aujourd'hui on ne se raconte plus mais que l'on peut se créer soi-même avec un clavier et une souris..